la télévision publique | 1952-1959
de la réalisation à la programmation
Parmi les avancées technologiques mises en veilleuse à cause du conflit armé, la télévision arrive enfin au Canada. Avant que les télé-diffuseurs américains s'emparent du marché canadien, le gouvernement fédéral légifère pour créer une télévision canadienne. Pour ce nouveau défi, il doit puiser parmi les talents les plus susceptibles de maîtriser ce nouvel outil de diffusion.
Les artisans du film représentent des prospects naturels. Leurs connaissances des notions de cinéma, éclairage, studio, mise en scène, etc. sont des atouts essentiels dont les codes doivent être adaptés au nouvel environnement. C'est tout un langage visuel qu'auront à inventer les pionniers du petit écran. L'expérience professionnelle de Ladouceur à titre d'artiste, conteur, cinéaste, fait de lui un candidat naturel. Il est appelé à participer à cette grande aventure.


Au fil des ans…
1952 / 1953
Aurèle Séguin, directeur du secteur francophone de la société d’état en gestation, est mandaté pour former les équipes nécessaires pour la naissance de la télévision à Montréal. Parmi les nombreux candidats qui sont évalués, le nom de Jean-Paul Ladouceur est retenu pour son expérience cinématographique et sa facilité de communiquer avec les jeunes.
Jean-Paul et sa famille qui compte maintenant deux enfants, déménage à Montréal et loue un deuxième situé au coin des rues Jourdain et Molson.
Réginald Boisvert, un rédacteur du journal « François » se joint à Jean-Paul pour développer le concept d’une émission pour le jeune public. Elle s’appellera « Pépinot et Capucine ». L’un y contribue les personnages et le concept visuel, l’autre signe les textes qui donnent une voix aux personnages.
Jean-Paul réalise les 25 premiers épisodes. À cette époque, les émissions de télé sont diffusées en direct car les moyens d’enregistrement sont peu développés. Cette carence technique explique pourquoi il reste très peu d’archives visuelles de cette période archaïque.
Grâce à ses connaissances et contacts dans le domaine de l'édition, il connaît la popularité de l'émission et propose d'exploiter les produits dérivés qu'elle peut générer. Il illustre et en publie des casse-têtes, cahiers à colorier, marionnettes à partir des personnages vedettes. Il entreprend même la réalisation d’une bande dessinée mettant en vedette Pépinot en collaboration avec un éditeur européen. Radio-Canada signifiera son déplaisir et mettra fin à ces initiatives.
Il contribue à la réalisation de « Tic-Tac-Toc » une émission jeunesse où des équipes de compétiteurs rivalisent d’adresse pour compléter un alignement victorieux.
Il collabore avec André Cailloux aux premiers épisodes du « Grenier aux images » où « Grand-père Cailloux » raconte de histoires auxquelles « Frisson des collines » une marionnette malicieuse ajoute ses réflexions saugrenues.
Il réalise un télé-théâtre « Rue de la Friponne » dont le script complexe porte la signature de Fernand Doré. Cette émission explore avec un succès mitigé les limites de la télé en direct confrontée au montage précis du cinéma.
Outre le temps qu’il consacre à la réalisation, il s’implique dans d’autres sphères de la production. Dessin de concepts, maquettes de décors, fabrication de marionnettes et d’accessoires pour les besoins de tournages spéciaux. On lui reprochera de trop en faire et de ne pas respecter les zones de compétence des divers services.
La famille Ladouceur atteint cinq membres avec l'arrivée d'un second fils.


1954 / 1957
La petite famille déménage à Rosemont dans un logement propriété du beau père de l’artiste.
Il accède à la direction de la production du réseau français de Radio-Canada.
Il consacre une grande énergie à la formation du personnel, à l’implantation de procédures standardisées.
Il prépare pour son bureau une fresque illustrant la complexité de la chaine de production et l’interaction de tous les intervenants qui sont mis à contribution pour la réalisation d’une émission télévisuelle.
Il prépare des maquettes de studio qu’il photographie pour produire des diaporamas détaillés qu’il utilise lors des cours de formation qu’il donne.
Ce travail de défrichage ajouté à celui de d’autres collaborateurs constitue la base de « Television Studio Practices Manual » de la Canadian Broadcasting Corporation.



1958
Pour étoffer sa grille horaine, Radio-Canada acquiert les droits de diffusion d'émissions produites à l'extérieur du Canada. Parmi celles-ci figurent des animations signées Disney en langue anglaise. Leur traduction est confiée à Haegerty productions que Ladouceur dépanne pour adapter les dessins au français.
Les années d’activité intense consacrées à façonner la réalité télévisuelle laissent peu de place à l’illustrateur. Cependant le défi d’entreprendre un manuel scolaire d’histoire le convainc de reprendre le pinceau.
Il consacre plusieurs mois à documenter et dessiner des scènes qui donnent vie aux deux volumes intitulés « l’Histoire de notre pays » pour les classes de huitième et neuvième années édités par les Clercs de Saint-Viateur.
Il prête à l’occasion son crayon aux bonnes oeuvres des Pères Capucins qui le sollicitent pour illustrer leurs publications dont la revue mensuelle « L’écho de Saint-François ».
Il illustre le calendrier de la Fédération des scouts catholiques du Canada et celui de la Fédération des guides catholiques du Canada.
Il effectue son premier voyage en Europe au service de la société Radio-Canada. Il prolonge ce séjour et documente avec sa caméra les les pays qu’il visite: La France, l’Angleterre et le Luxembourg.

1958 / 1959
En décembre 58, les réalisateurs de Radio-Canada déclenchent une grève pour former un syndicat professionnel rattaché à une grande centrale syndicale. J. P. Ladouceur, qui fait partie de l’administration supérieure de la société, doit faire face avec ses confrères administrateurs à la tempête sociale qui en découle.
Après plusieurs semaines tendues, la grève se conclut par la victoire des réalisateurs. Pour atténuer les ressentiments des adversaires, les anciens administrateurs sont tassés et mis en disponibilité.